À Mayotte, la production de chaux est en grande partie consécutive aux techniques de construction en pierre maçonnée. Toutefois un premier usage de la chaux pour la consommation de bétel ou le calfatage des navires est attesté dès le XIe siècle grâce au four de Bagamoyo étudié par Cl.Allibert et A. Argant. Les coquillages servaient de matière première pour la finesse de la chaux ainsi obtenue. J.S. Leigh observe encore cette technique au nord ouest de Madagascar au début du XIXe siècle.
La production en grande quantité de chaux, destinée à la construction maçonnée apparaît elle-aussi de manière certaine à partir du XIe siècle, et s’est poursuivie jusqu’à une époque très récente, jusqu’à être supplantée par l’importation de sacs de ciments et la réglementation protégeant les récifs coralliens.
La technique ancienne de production de la chaux est aujourd’hui bien connue par l’archéologie qui a pu étudier des zones de productions (Acoua, Tsoha,...) et en dresser un premier inventaire.
La chaux à Mayotte est obtenue par la calcination du corail. Les blocs de corail récoltés sur les platiers madréporiques étaient ensuite fractionnés en fragments de quelques centimètres pour en faciliter la cuisson. Ils étaient ensuite entassés dans des fosses sur lequel un bûcher était entretenu pour atteindre une température de 900 degrés, jusqu’à la cuisson total du calcaire et sa transformation en chaux vive.
On obtenait ainsi une masse poudreuse blanche, la chaux vive, qui était ensuite copieusement arrosée d’eau pour «l’éteindre» ou la «tuer» au risque de se causer des brûlures avec la chaux vive (cela explique pourquoi les zones de production de chaux se situent à proximité de points d’eau douce).
Cette masse pouvait être ainsi conservée plusieurs mois.
Mélangée à du sable ou des gravillons coralliens et de l’eau, elle devenait l’ingrédient essentiel pour la fabrication du mortier de chaux employé comme liant dans la confection des murs maçonnés. La facilité à se procurer du corail à Mayotte pour fabriquer la chaux explique la solidité des maçonneries obtenues où l’on ne lésinait pas sur la quantité de chaux dans la composition des mortiers.
À gauche: exemple de fosse à chaux, vue en coupe (baie d'Acoua), à droite, fragments de corail ayant échappé à la cuisson.
Il apparaît aujourd’hui, grâce à la recherche archéologique, que ce sont les enclos urbains et quelques sépultures qui furent les premières constructions maçonnées à Mayotte au XIe-XIIIe siècle. Puis, à partir du XIVe siècle apparaissent les premières mosquées en pierre, suivies des habitations aisées au XVe-XVIe siècle.
Durant l’époque coloniale, les procédés industriels en usage à Mayotte pour la production du sucre de canne (1850-1950) employaient la chaux pour participer à la décantation du jus de canne. Cela explique la présence de nombreux fours à chaux associés aux vestiges des usines sucrières de Mayotte.