Le chantier s'est poursuivi ce jour par le dégagement d'une partie de la porte. les niveaux du dépotoir extérieur au rempart sont constitués d'un sol rubéfié, très fin, avec des "loupes" cendreuses. L'hypothèse d'une zone de vidange de foyers n'est pas privilégiée car le sol rubéfié garde d'importantes traces de chauffe correspondant à un incendie. Ces traces d'incendie sont observées sur la totalité de la zone de fouille, à l'extérieur du rempart. Des rejets alimentaires et des tessons de céramique continuent d'être exhumés en quantité de cette unité stratigraphique. Tout le mobilier archéologique n'a pas encore été étudié, mais il semble, par les tessons de céramique locale provenant de cette unité stratigraphique où il n'a pas été découvert de décombres du rempart, que les XIVe-XVe siècles (tessons de tradition Acoua) correspondent à l'ultime période d'existence du rempart. Le remaniement de la porte du rempart observé semble avoir eu lieu lors de cette phase tardive.
Si cette hypothèse chronologique est vérifiée (un prélèvement de charbon piégé dans les maçonneries de la porte tardive permettra une datation de sa construction par analyse RC14), il est possible d'envisager que la restauration de la porte du rempart au XIVe-XVe siècle soit contemporaine de l'apparition des grandes demeures aristocratiques dans le quartier des notables étudiées entre 2005 et 2008. Dans ce cas, cette reconstruction de l'accès au village appartiendrait à un programme urbanistique cohérent visant à imposer la marque d'une nouvelle organisation politique, celle de la chefferie fani où un clan s'est accaparé le pouvoir politique autrefois détenu par la communauté villageoise. La nouvelle entrée fortifiée du village, tout comme ces grandes habitations en pierre, servant à magnifier ce pouvoir.
sol rubéfié (niveaux XVe siècle du dépotoir)
La destruction du rempart se déroulerait au XVe siècle, ce qui correspond à un contexte politique particulier: c'est l'époque où certains chefs appelés fani imposent leur autorité sur des portions de l'île (on pense au fani de Mtsamboro, présenté par les chroniques comme le "cheik" de tout le pays, avant l'établissement du sultanat par les princes shirazi) ou encore, à l'établissement du sultanat shirazi dans les dernières années du XVe siècle. Dans les deux cas, la destruction du rempart serait le fait d'une conquête, mettant symboliquement un terme à l'indépendance des fani d'Acoua.
Ce qui est troublant, c'est que les chroniques ne mentionnent pas l'existence d'Acoua qui était pourtant un site de taille importante, alors même que Mtsamboro est resté dans les mémoires grâce à l'alliance de son fani avec les premiers shirazi. Est-ce parce que le fani d'Acoua fut vaincu par son voisin de Mtsamboro (la tradition villageoise garde le souvenir de conflits entre les deux villages) lorsque celui-ci voulut s'imposer sur les autres fani? ou bien est-ce la conséquence du fait que le fani d'Acoua refusant l'autorité nouvelle des shirazi fut vaincu militairement?
Le lendemain, les plus courageux (Dimanche matin oblige) s'étaient donnés rendez-vous pour poursuivre le chantier:
M.Pauly