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13 février 2012 1 13 /02 /février /2012 09:44

L’analyse du mobilier archéologique en provenance de la fouille d’Acoua (campagne 2011) se poursuit avec notamment l’étude de la consommation alimentaire. Parmi les rejets alimentaires accumulés dans les niveaux du dépotoir (XIIIe-XVe siècle), les coquillages y sont très abondants. À l’exception de l’escargot terrestre (achatina) qui est peut-être présent dans ces accumulations de façon accidentelle (bien que la consommation d’escargot était encore pratiquée, au village d’Acoua, il y a deux générations seulement), les coquillages sont tous d’origine marine et reflètent les anciennes habitudes alimentaires.

19 espèces de coquillages étaient ainsi principalement consommées, ce qui est en soit remarquable par comparaison aux sites médiévaux de l’Afrique swahili. Par exemple, à Shanga (Kenya), Horton ne recense que 12 espèces de coquillages consommées, et estime que la majeure partie était employée comme appât pour la pêche ou consommés uniquement pendant les périodes de disette. En effet, la consommation de coquillages et en contradiction avec les interdits alimentaires prescrits par l’islam. Or, plus l’on descend vers le sud, le long des côtes africaines, plus les populations côtières, y compris musulmanes, consomment des coquillages. Ainsi, Horton observe qu’à Zanzibar, la consommation de coquillage est courante, elle est également pratiquée au Comores. À Mayotte, la récolte de nerita à marée basse est encore aujourd’hui très fréquente tandis que les pêcheurs emploient les lambis comme appât pour la pêche (mais dans ce cas, les coquilles sont retrouvées brisées au bord des plages).

Les espèces les plus abondantes dans les niveaux archéologiques à Acoua sont celles qui se récoltent facilement le long du littoral, contre les rochers, à marée basse. Lors des marées à plus forte amplitude, des espèces comme des lambis, tridacna ou triton étaient collectées. Très souvent, les individus ont été ramassés avant d’atteindre leur âge adulte, signe d’une récolte systématique des coquillages, sans recherche de gestion de la ressource, ce qui peut expliquer les variations des quantités fournies selon les couches archéologiques: certaines espèces, surexploitées, disparaissant des récoltes. Les plus grands individus ont volontairement été brisés pour extraire le mollusque.
Toutes les espèces ne sont pas représentées parmi les rejets alimentaires: les cônes en sont quasiment absents par exemple. Enfin, les huitres et moules ne se rencontrent que dans les niveaux du XIIIe-XIVe siècle. On ne retrouve pas l’abondance des arca anadara erythraeonensis, consommés en grande quantité sur les sites de Majicavo et Dzaoudzi (niveaux d’époque Hanyoudrou repérés en 2011) et qui étaient également employés pour décorer les céramiques locales jusqu’au XIIIe siècle.

 

nerita longii nerita lineata

À gauche nerita longii, à droite nerita lineata.

L'espèce nerita est très abondante parmi les rejets alimentaires. Encore aujourd'hui, à Mayotte, cette espèce est collectée à marée basse, par les femmes, malgré la faible quantité de nourriture offerte par ce mollusque.

 

 

lambis  lambis chiragra

À gauche lambis, à droite lambis chiragra.


strombina cerithium

À gauche strombina, à droite cerithium.


calliostoma ligatum  turbo marmoratus

À gauche calliostoma ligatum, à droite turbo marmoratus. La coquille du turbo est couramment employée pour confectionner des cuillères en nacre.

 

Strombus lentiginosus  cymatium triton

À gauche, strombus lentiginosus , à droite cymatium (triton).

 

cypraea cypraea annulus

cypraea (annulus, monneta et tigris): ici assurément récoltés pour être consommés, ces coquillages sont aussi connus pour avoir servi de monnaie (cauris) dans l'océan indien durant l'époque moderne.

 

tectus conus strombus

À gauche tectus conus, à droite strombus.

 

arca anadara erythraeonensis tridacna maxima

À gauche arca anadara erythraeonensis  et à droite tridacna maxima.

 

mytiloida ostrea

À gauche mytiloida, à droite ostrea.


harpa ventricosa achatina

À gauche harpa ventricosa, à  droite achatina. L'escargot terrestre est tellement abondant parmi les rejets du dépotoir que sa consommation est quasiment certaine.

 

M.Pauly

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Abstract

 

The Society of Mayotte History and Archaeology (SHAM) was founded in 1990. For the last twenty years it has undertaken archaeological researches on the island in close connection with the French National Cultural Authorities (DRAC) and the Centre d'Etude et de Recherches sur l'océan Indien occidental et le Monde Austronésien (formerly CEROI, nowadays CROIMA, INALCO, Paris). Several archaeological sites have already been discovered and studied. Besides, the Society has played a part in the elaboration of the island archaeological map. Its members have published many articles and books.

 

Key words: archaeological excavations, Comoro Islands, Mayotte island, Indian Ocean, cultural traditions, Swahili and Malagasy civilisations, Austronesian civilisation, history, mediaeval pottery, stone architecture, Dembeni civilisation, island civilisation, islamisation, shirazi sultanate, islamic civilisation, mediaeval trade, human migrations.

 

Treize siècles d'histoire!

Sgraffiato à voluteCe site propose la découverte de la recherche archéologique à Mayotte, facette peu connue de son patrimoine historique, riche d'une occupation humaine attestée dès le VIIIe siècle après J-C.

C'est uniquement l'histoire ancienne  ou pré-coloniale de Mayotte, antérieure à sa cession à la France en 1841 qui est présentée ici.